La valse des silences - Malek Lakhal
Quatrième de couverture :
« Je parlerai fort, je crierai s’il le faut, je dirai haut ce qu’ils taisent tous, je dirai tout ».
A dix-sept ans, Ahmed part à Paris poursuivre ses études. Il n’a plus à se cacher, à mentir à sa famille, à dissimuler son amour pour les hommes. Mais Paris n’est pas la ville espérée et Tunis lui manque : de retour, Ahmed s’accommode des mondes clos et des silences.
Lorsqu’il découvre qu’il est malade, il sait qu’il va devoir repartir. Et pourtant, ne serait-il pas temps de rompre enfin les non-dits, de livrer bataille contre soi et les autres, d’affirmer enfin qui il est ?
Premier roman qui révèle une voix unique, Valse des Silences dresse la trajectoire magnifique d’existences construites sur les secrets de l’exil, celles de femmes et d’hommes qui se débattent mais n’ont pas abdiqué, espérant une place enfin pour la vérité et la révolte.
Editions : JC Lattès – ISBN : 978 2 7096 6989 4 – Broché : 275 pages – Parution : Mai 2022 – Prix : 20 euros
Mon ressenti : Indiangay
J’ai acquis ce livre au hasard n’en ayant jamais entendu parler auparavant, avec cependant une envie de le découvrir, Le titre et la quatrième de couverture me semblant plus qu’intéressante. De plus, les auteurs maghrébins sont de fort bon écrivains.
Il est rare, du moins c’est la première fois que je lis un livre évoquant le sida en toile de fond, écrit par une femme. Mais bien que la maladie soit omniprésante dans ce livre, elle sert de déclencheur à une introspection sur les relations que nous avons les uns avec et envers les autres :
L’auteure nous raconte en substance la vie des personnes qui entourent Hamed, par le biais de réflexions, de sentiments qu’elles cachent au plus profond d’elles-mêmes et qui au fond ne sont pas dupes de certaines vérités.
Bien que le livre tourne autour de l’homosexualité et de la maladie d’Hamed, et que la parole lui soit donnée en priorité, l’auteure en plus d’Hamed le fils, donne la parole à :
. La mère qui subit depuis de longues années les infidélités du père, et qui malgré les sourires en coin des amis (ies) et des relations, s’évertue à sauvegarder les apparences …
. L’amie, jeune femme qu’Hamed a aidé à s’exiler à Paris, lesbienne reniée par sa famille qui se refuse à jamais de retourner en Tunisie.
. Le frère, qui se rend compte qu’Hamed est malade, qui sait qu’il est homosexuel, l’ayant vu à Paris, avec son compagnon…
. Le père, qui ne comprend plus ce fils avec qui il avait une relation privilégiée, et qui depuis des années s’est muré dans le silence, ne parlant que si on lui adresse la parole…
. La tante, scandaleuse, qui avait épousé son mari contre l’avis de la famille, qui divorcé toujours contre l’avis de celle-ci, vit seule, et mène sa vie comme elle l’entend….
Et puis les autres, le médecin de Tunis qui lui annonce sa maladie, sans empathie, sans le regarder, lui faisant comprendre qu’il sera mieux soigné en Europe. Les soignant à Paris, pour lesquels « ces patients » ne sont que des numéros, remplissant les salles d’attente, des mourants en devenir, calmes, résignés à partir sans bruit.
A 17 ans Hamed est parti en France, pays rêvé, idéalisé, ivre de liberté, ou il pourrait enfin être lui, vivre sa vie sans contrainte, sans jugement, loin des traditions, du regard des uns et des autres.
Pour s’intégrer, il n’a pas ménagé ses efforts, s’efforçant de gommer toutes les aspérités qui auraient pu l’identifier comme n’étant pas natif de Paris, ville ou il a choisi d’élire domicile. Mais, l’acceptation n’est qu’en surface, même auprès de ses soi-disant amis gays, ou malgré son élocution parfaite, ses idées progressistes, il restera toujours l’arabe sans éducation, peu évolué voire rétrograde. Tiraillé entre deux pays, celui d’accueil et le sien, avec pour point commun la solitude.
Le retour au pays ne se passe pas comme prévu. Les angoisses de sa vie cachée, la maladie que personne ne doit découvrir, les traditions qui réapparaissent par le biais de sa mère qui s’obstine à lui présenter des jeunes filles à marier. Etouffant de ses secrets il s’enferme dans la passivité et le silence tout comme sa famille. Sa mort programmée lui fait poser un regard lucide et sans concession sur la société tunisienne empêtrée dans les non dits.
J'ai beaucoup apprécié ce livre, qui est fort beau. L'écriture est belle, pleine de justesse, toute en émotions. Je me permets de le recommander à la lecture.
A propos de l’auteure :
Malek Lakhal est chercheure, politiste de formation. Elle est la co-fondatrice du magazine littéraire : Asameena. Valse des Silences est son premier roman.