Dans ma chambre - Guillaume Dustan
Quatrième de couverture : Néant
Mon Avis : Volodia
Il s'agit du premier roman de Guillaume Dustan. Essentiellement autobiographique qui nous fait pénétrer dans l'intimité de la vie de l'auteur. Ses journées entières à pianoter sur minitel, pour rencontrer des "coups d'un soir". Des soirées et des nuits à se droguer, à s'envoyer en l'air avec des types qu'on drague et qu'on ramène chez soi comme des courses du supermarché.
C'est un livre cru, certains diront érotiques, d'autres dont je fais parti le jugeront pornographique, mais avec quelque chose d'autre que du cul et des performances sexuels, autre chose que la trivialité de l'auteur. Il est le reflet d'une époque en pleine période sida, une époque ou dans le milieu gay, tout le monde couche avec tout le monde, ou l'on ne s'étonne plus d'être séropositif et ou c'est la minorité qui est séronégatif. Une époque ou l'on commente la mort d'un tel avec une certaine indifférence. Une époque ou après l'étonnement, la peur et l'hécatombe des premiers cas de sida, un traitement vient de faire son apparition et l'on se reprend à espérer avoir encore quelques années à vivre, à profiter de tout ce qu'elle nous offre y compris ses excès. Car malgré la maladie, personne ne songe à changer ses habitudes, et l'on continue à draguer, à se shooter, à "coucher" avec ou sans capotes, fréquenter les backroms du "Transfert" et du "Qg".
Dustan, nous dévoile ses goûts à la limite de la violence dans le fantasme, les codes sado-maso et cette quête effrénée de mecs, de culs, de sperme et de drogues, toutes les drogues (poppers, esctasy, acide, cocaïne) qui circulent semble-t-il librement et que l'on offre ou s'offre comme on le ferait d'un verre.
Les descriptions torrides de scènes d'amour entre deux hommes, la description du "matériel" contenu dans ses placards, les initiations éprouvantes d'un partenaire. Nous assistons à une quête sans fin dans lequel Dustan semble se perdre à la recherche d'un amour impossible ?
Ce livre n'a pas les qualités littéraires que l'on s'attendrait à trouver chez n'importe quel auteur. Il n'a pas de style, pas de ponctuations, les phrases sont décousues, parfois incompréhensibles. Mais c'est un livre fort. Dustan a ce don de nous prendre aux tripes, de nous faire partager sa vie au point de s'oublier soi-même ce qui pour moi est assez est rare et, j'ai aimé !
Editions : P.O.L. - ISBN : 9 782867 445255 - Broché 155 pages - Prix 14 euros
Guillaume Dustan, de son vrai nom William Baranès est né en 1965 à Paris. Il y est décédé en 2005 après avoir avalé par accident une surdose médicamenteuse (version officielle). Il a exercé la profession de Magistrat avant de se tourner vers l'écriture puis l'édition.
Il cré au Editions Balland, le Rayon Gay, qui deviendra par la suite "le Rayon" qui sera la première collection entièrement LGBT éditée en France. Une cinquantaine de titres y seront publiés avant sa fermeture en 2003.
En 1999 il reçoit le prix de Flore pour son roman "Nicolas Page". Sa renommée s'est accru en raison de sa position sur le barebacking, littérallement "monter à cru" ce qui lui vaudra les foudres de Didier Lestrade de l'association de lutte contre le sida Act Up.